Afghanistan + Pakistan : les émeraudes de la paix

Il y eu les diamants de sang en Afrique de l’Ouest, il y aura les émeraudes de la paix en Asie Centrale

In Les Échos 28 11 2012

L’Université Polytechnique de Kaboul, la Fondation Pakistanaise pour la Science et nos deux ambassades à Kaboul et Islamabad organisaient récemment des colloques sur la gestion durable des ressources minières. J’étais invité à démontrer aux autorités ministérielles et scientifiques des deux pays voisins comment de vigoureuses Doctrines Ressources Naturelles sont le point de départ d’un développement économique robuste. Ces officiels montrèrent une envie de collaboration bien éloignés des stéréotypes médiatisés.

Les enjeux de l’Afghanistan et du Pakistan

L’enjeu de l’Afghanistan est la recherche d’un relais économique après le futur désengagement occidental de 2014. La motivation du Pakistan est d’alimenter en matière premières de toutes sortes l’urbanisation de sa démographie explosive.

Les deux pays sont voisins et ils disposent des derniers richissimes sous-sols d’envergure mondiale encore vierges d’exploitation minière de grande ampleur. Tout y est : pierres précieuses et semi-précieuses, métaux de base, métaux précieux, métaux stratégiques, fer, charbon mais aussi tous les produits de carrière dont le marbre … C’est un sous-sol riche, un nouveau Brésil.

En résumé de cette semaine passée entre les deux pays nous pouvons retenir quelques points :

• Les deux territoires sont pratiquement à parité sur le besoin d’une Doctrine Matières Premières communes, a parité également sur l’inventaire géologique et minier, à égalité aussi sur la reconnaissance des besoins économiques et sociaux des populations qui habitent les futures régions minières ; sans grande disparité sur l’absence d’infrastructures ; avec des projets de législation qui devront converger quant à la gouvernance, aux royalties, aux taxes et à l’environnement ; sans grande disparité également sur l’absence de capital humain pour mener à bien des projets miniers.
• La vision stratégique commune entre l’Afghanistan et le Pakistan pourrait s’exprimer dans le domaine des infrastructures : l’Afghanistan est enclavé, les flux logistique devraient naturellement se diriger vers le sud et le sud-est parce que le Pakistan est demandeur de matières premières et qu’il dispose de la porte maritime indispensable aux exportations afghanes.


• La sécurité est évidement un questionnement mais Kaboul y répondrait avec une police des mines forte de 7500 hommes. Islamabad, en plus de ses forces armées omniprésentes, vise la sécurité via les retombées économiques des développements miniers sur les zones tribales frontalières et du Baloutchistan.
• L ’Afghanistan à déjà conscience d’être sous l’œil de la communauté internationale post 2014 : la volonté ministérielle est réellement d’améliorer la vie des populations grâce aux rentes minières et c’est pourquoi l’ensemble doit être transparent pour éviter les soupçons de corruption interne. Ainsi, le ministre des mines afghan prenait l’initiative il y a quelques jours de publier sur son site internet une copie des contrats signés avec les sociétés minières et énergétiques ainsi que la copie des appels d’offre des futures concessions. C’est une réelle volonté de progrès bien opposée aux destins des impôts européens investis à Kaboul depuis des années et qui sont partiellement réinvestis par exemple dans des projets immobiliers privés dans le Golfe.
•Cette volonté de transparence est identique au Pakistan alors que le ministre en charge annonçait des royalties minières substantielles destinées aux populations défavorisées des zones frontalières.

Conclusion

La France peut apporter ses compétences et le poids de son histoire.

Les coopérations pakistano-afghanes dans le domaine de l’exploration géologique vont commencer : la richesse des sous-sols ne s’arrête pas à la frontière entre les deux pays et le ministre pakistanais accueillait favorablement l’idée de muscler cette exploration en renouvelant l’accueil des compétences de géologues français (étudiants ou professionnels).

La France peut aussi apporter le poids de son histoire car son mode de pensée et de faire sont bien accueillies dans les deux pays. Le modèle de coopération le plus souvent cité ne fut-il pas la Communauté Européenne du Charbon et de l’Acier : rendre la guerre entre la France et l’Allemagne non seulement impensable mais aussi matériellement impossible. Cette idée exprimée par Robert Schuman résonne au dessus de la frontière entre les deux pays, la ligne Durand, comme pour la gommer.

PS : Merci aux Bretons de Kaboul pour leur protection bienveillante.