L’or, un substitut aux sondages Sarkozy-Hollande

Cette année, les prix des métaux précieux seront aussi dirigés par la politique, notamment les incertitudes et les décisions liées à la crise européenne. Et rien ne provoquera plus de volatilité que des élections…

La crise commença aux Etats-Unis

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Sur ce graphique, la courbe jaune indique que dès 2005 les investisseurs américains achetèrent de l’or. La respiration des cours liée à la faillite de Lehman Brothers est aussi parfaitement visible au troisième trimestre 2008 lorsqu’ils perdaient 30%, de 1.000 dollars l’once vers les 700 dollars. Puis la crise s’intensifie, les européens et les asiatiques achètent de l’or, les cours culminent sous les 2.000 dollars au troisième trimestre 2011. Au quatrième trimestre, ils se comblaient de 20%.

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Le parcours réussi de l’argent métal (bleu Klein) débute sous les 7 dollars en 2005. A 21 dollars au printemps 2008, il s’affaisse à 9 dollars sous l’impact des Lehman Brothers mais bondit vers les 50 dollars en avril 2011 pour lentement s’éroder de 40% début 2012.

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Les cours du platine (bleu outremer) partaient d’une base deux fois plus haute que l’or en 2005 et culminaient début 2008 au dessus de 2.200 dollars l’once. Après la lourde chute des cours du troisième trimestre 2008, les prix, largement sous les 900 dollars, se reprenaient en direction des 1.900 dollars à l’été 2011. Ils reperdaient 26% début 2012

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Les prix du palladium (fuchsia) ont une configuration différente. Sous les 600 dollars début 2008, ils s’approchaient de 150 dollars à l’automne 2008 (quel merveilleux achat à l’époque) et, à l’inverse du platine mais comme l’or, ils dépassaient leur record de 2008 pour s’affirmer au dessus de 850 dollars en février 2011 avant de se dégrader de 28% début 2012.

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Le rhodium (vert) est le plus spectaculaire. Aux environs de 1.500 dollars début 2005, il explose à 10.000 dollars à la fin du printemps 2008, puis implose sous les 1.000 dollars cinq mois plus tard. Ce passage de 10.000 à 1.000 fut très cruel, beaucoup d’intervenants, et non des moindre, sont encore en hypoxémie silencieuse. Ensuite, le rhodium se reprenait péniblement vers les 3.000 dollars mais perdait 60% début 2012.

Il apparait donc que le meilleur achat sur les six dernières années fut le plus petit des cinq métaux précieux : l’argent métal, qui progresse de près de 450%, l’or et le palladium sont à 350%, le platine ne fait que 160% et le rhodium ? après des performances retentissantes ? est proche d’une période blanche.

Où allons-nous ?

Pour 2012, les prédictions sur les prix de l’argent sont proches des cours actuels mais ils suivront l’or. Le platine et le palladium devraient augmenter sous les effets d’une meilleure demande industrielle. Il suffit de regarder les signaux faibles d’un éloignement de la crise économique, notamment aux Etats-Unis : la différence du prix de l’acier aux USA et en Chine par exemple, ou bien les ventes d’automobiles américaines.

De plus, les conséquences de la sous-capacité électrique sud-africaine permettront peut-être au platine de dépasser l’or, alors que ce dernier devrait s’affaisser. Les prix de l’or, en effet, sont annoncés entre 1.440 et 2.500 dollars : 1.060 dollars d’écart ! La partie basse des prévisions est sous l’influence d’anticipations classiques : taux d’intérêt, achats de banques centrales, ETF, offre minière. Sans surprise, la partie haute du spectre est attachée à une anticipation égarée et incertaine d’une faillite bancaire européenne à la Lehman.

Cette année, toutefois, les prix des métaux précieux seront aussi dirigés par la politique, notamment les incertitudes et les décisions liées à la crise européenne. Et rien ne provoquera plus de volatilité que des élections dont seul un Attus Navius peut prévoir les résultats en coupant en deux un lingot d’or. Mais jouons ce jeu une minute et posons quelques hypothèses.

Deux échéances politiques aux résultats certains, élections présidentielles russes et américaines, resteront d’influence secondaire tandis que la troisième est capitale pour la zone euro, la présidentielle française. D’ici à dire que les résultats du 6 mai 2012 et les décisions de l’Eurozone qui en résulteront, ou l’incertitude de leurs anticipations pour être exact, donneront le prochain tempo du prix de l’or, il n’y a donc qu’un pas. Anticipons-le.

Les prix des “futurs” sont-ils des sondages ?

Si le président Sarkozy devient candidat et qu’il est réélu ou bien si le candidat Hollande est élu, ou encore si ni l’un ni l’autre ne franchissaient le premier tour mais que deux autres prennent place au second tour : qu’attendre des prix de l’or ?

Si aucun des deux leaders dans les sondages n’atteignaient le premier tour, l’incertitude européenne qui s’en suivrait provoquerait une belle envolée de l’or tout comme de l’argent métal. Les demandes du platine et le palladium sont industrielles mais leurs prix n’échapperaient pas à un coup de chaud.

Si le candidat Hollande était élu, le temps du changement à Paris, le temps d’accordage des nouveaux instruments de l’orchestre financier européen, provoqueraient une certaine incertitude, une mise au point, une latence, et les prix de l’or tout comme ceux de l’argent s’orienteraient vers le nord. Il est probable que les platinoïdes ne suivraient pas.

Si le prochain candidat Sarkozy était réélu, le ré du mot réélu pèserait immédiatement sur les prix de l’or, il est plausible que les prix s’orienteraient vers le sud.

Les marchés des métaux précieux chérissent les prévisions mais donnent-ils une indication de l’élection française ?

En France, il n’y a plus un réel marché du lingot d’or. La perte de l’AAA n’a provoqué aucune panique sur l’or en France, une baisse de l’once d’or sur le marché international était même enregistrée vendredi. Les marchés de l’argent et des platinoïdes français ont eux aussi disparu. Aucune réponse de ce côté-là.

En revanche les swaps d’or, dont les termes s’étaient regroupés avant et après la crise de Lehman, connaissent une nouvelle dispersion qui préfigure une prochaine forte volatilité dont la direction générale sera donnée par les investisseurs. Les intérêts de ces derniers sont baissiers et ils précèdent la baisse de l’or depuis début août 2011. De plus, la banque centrale de l’homme de la rue, les ETF, dont les quantités sont à présent collationnées par Reuters, sont en décollecte depuis décembre.

Les prix des métaux précieux ne sont pas des bulletins de vote, mais nous en concluons que, pour le moment, l’investisseur et le particulier provoquent et anticipent une baisse du marché de l’or.

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Tout cela ne remplace pas les sondages, la politique est bien plus sérieuse. Mais, tel l’haruspice, nous attendrons l’évolution de ces deux derniers graphiques qui superposent les prix de l’or (jaune) et les intérêts des investisseurs (rouge), avec celles des sondages de la présidentielle.
Publié dans Les Échos le 16 01 2012