Mines de France, Made in France

Grâce à ces réformes, le ministère du redressement productif disposerait de bonnes mines et d’autant d’emplois non-délocalisables.

Jusqu’à la fin du siècle dernier la France possédait de solides sociétés métallurgiques et minières aussi bien dans les métaux de base que dans les métaux stratégiques et critiques. Citons deux d’entre elles. Métaleurop produisaient ses 60 tonnes d’indium et 35 tonnes de germanium chaque année, mais la société disparaissait il y a moins de dix ans. A la même époque, la société CLAL, qui transforma des centaines de tonnes de métaux stratégiques depuis deux siècles, faillit au sens propre et financier après avoir été autoritairement évidée de son propre stock industriel de métaux par   pour le vendre.

Il y a des années, Imetal n’était pas encore scindée entre l’Eramet et l’Imerys d’aujourd’hui, la Cogema avait exploré et exploité de l’uranium en France avant de se lancer Outre-mer, elle forma ensuite Areva avec Framatome ; le Bureau de Recherche Géologique et Minière avait exploré la terre entière avec succès et repoussait ses limites pour devenir mineur avant d’abandonner cette piste pour diverses raisons. 


Les années ont passé.

Aujourd’hui, il reste quelques entreprises minières privées en métropole et Outre-mer, et L’Etat est resté actionnaire de deux sociétés minières. Ces dernières, sont souvent figées sur leurs sites historiques et ont des capitalisations boursières très faibles par rapports aux critères internationaux, immobilisée pour l’une et effondrée pour l’autre. Pourtant elles disposent chacune d’excellents gisements en amont et de superbes clients en croissance en aval, mais au milieu leur gestion ou leur gouvernance, et par conséquent les bénéfices, sont des questions.


De son côté, le BRGM retrouve une dynamique au fur et à mesure que la génération qui s’en va transmet les richesses de ses connaissances géologiques à celle qui arrive. Cela sera encore mieux le cas dès que la Compagnie nationale des mines de France (CMF) nouvellement annoncée sera à l’oeuvre de manière appropriée.


Cet attelage étatique est-il suffisant pour les besoins de l’industrie française (chimie, pharmacie, aéronautique, automobile, défense, énergies climatiques…), peut-il traverser la crise des métalloïdes, est-il capable d’aborder le sujet des mines et métaux sous-marins, peut-il créer des emplois ? Une mine nécessite un cadre législatif, la découverte d’un gisement et donc de l’exploration (c’est l’objet de la CMF), puis l’installation sur le gisement d’une entreprise minière saine, solide et responsable avec des emplois non délocalisables.

Les services de l’Etat s’interrogent; l’Etat peut-il améliorer sa situation ?


– Oui, s’il réforme le code minier dans le but de créer des emplois : c’est à dire s’il est éloigné du monochrome et proche d’un pluralisme regroupant responsables territoriaux et  professionnels ; sans oublier d’envisager le lointain horizon des mines sous-marines, si différentes des mines terrestres notamment pour la protection de l’environnement mais également différentes du monde des hydrocarbures off-shore.

L’aboutissement de cette réforme est programmée pour la fin de l’année .


– Oui si il pilote deux autres actions.

 + Premièrement, la construction d’une task-force publique-privée (dont la CMF pourrait être l’embryon car en plus de la connaissance géologique il faut également des capitaux importants) dirigée de manière incontestable et orientée vers l’innovation: dans l’exploration via notamment les outils du numérique, l’acquisition de gisements, les emplois et la sécurité environnementale.

+ Deuxièmement la profonde réforme des entreprises minières dont il est actionnaire. Ici le travail de leadership reste à faire.

La métropole pourrait-elle avantageusement s’inspirer de l’exemple néo calédonien ?
L’industrie minière y bénéficie d’une alliance particulière : adhésion de la majorité de la population autour d’une stratégie minière adaptée à la mondialisation, un code minier refondu pour une gestion à long terme, un accès aux ressources rénové, des réserves techniques ; donc de l’emploi grâce à la construction de l’exploitation de deux nouvelles mines, Koniambo et Goro et de deux usines délocalisées l’une en Corée et l’autre bientôt en Chine.

En moins de 5 ans,  les 250 000 calédoniens  auront reçu pas moins de 10 milliards d’euros investis dans les nouvelles mines de Nouvelle Calédonie. De quoi faire rêver plus d’une région métropolitaine aux massifs prometteurs: Bretagne, Massif central, Vosges
Publié dans Les Échos le 21 02 2014