On est loin de Churchill. Que Boris se soit appelé Jean-Pierre ou Helmut le résultat du vote eu été différent. On se dit qu’au nom de l’intérêt supérieur de la nation, parfois celle-ci doit refréner de donner son avis
La fascination du faux a supplanté l’illumination du vrai. L’entreprise du Brexit a tourné en faveur d’une exubérance décomplexée puis du mensonge et enfin de la pantalonnade. On est loin de Churchill. Boris voilà un prénom qui attirera les conspirationnistes des théories d’influences: que Boris se soit appelé Jean-Pierre ou Helmut, le résultat du vote eu été différent.
L’Europe c’est la paix depuis le début et c’est toujours la paix, sauf pour ceux qui la quitte. Où est la paix en Angleterre ? Le moment est venu pour les âmes noires de se laver car le 23 juin est une comète qui a tout brûlé sur son passage, elle a emporté raison et déraison, un chaos.
Un pays qui s’en va, qui s’écartèle, un pays -in et out- durablement divisé en deux , des dirigeants politiques qui se poignardent comme jamais. puisqu’il n’y a pas de vérité au milieu de cette cacophonie anglaise, quand la loi ferme un œil la reine ouvre le sien, elle qui monte au créneau pour temporiser, pour que l’Angleterre prenne son temps. Malheureusement elle prend son temps, erreur car le temps fait son œuvre dans l’autre sens, au nom du référendum la population impatiente s’insulte dans la rue, en son nom elle dissous le Fair-Play, en son nom elle se déchire ; ce que les jeunes attendent des anciens, ce sont des exemples et non des critiques et donc des écoliers anglais copient la xénophobie de leurs parents. Même la rumeur veut que le MI6 votait pour rester mais le MI5 pour sortir, sans doute une question de culture ; mon nom est Bond, le mien est Smith…
D’aucuns gazouillent que les anglais en ont eu assez des experts qui prédisaient un chaos post Brexit. Paraphrasons Jean de la Fontaine : qu’arrive-t-il à ce petit oiseau refusant les conseils de l’experte hirondelle : « les oisillons, las de l’entendre, se mirent à jaser aussi confusément »… « Nous n’écoutons d’instincts que ceux qui sont les nôtres, et ne croyons le mal que quand il est venu ».
Les institutions européennes basées en Angleterre migreront vers le continent et c’est bien normal. Tout comme de nombreux services financiers, et c’est à encore bien normal. Toutefois, l’avenir n’est pas si sombre pour l’Angleterre et le Pays de Galles, la sérendipité existe également en politique. Dans la City tout le monde surveille tout le monde parce qu’elle est inventrice de l’Intelligence Économique. Impossible que cette dernière disparaisse comme le Fair-Play dans le référendum.
Rebondissant sur l’erreur, c’est à elle de trouver de nouveaux axes de développement. Par exemple, si la City n’a plus d’empire à gérer, qu’elle devienne le Hong Kong ou le Singapour de l’Union Européenne, une autre Suisse, un Delaware ? Des marchés tendent leurs mains. Les devises : renminbi, dollar australien, la Nouvelle Zélande puis toutes celles du Commonwealth ! Dans les métaux le London Metal Echange était là avant l’Union Européenne, il vivra sans elle, d’autant plus que l’institution appartient désormais à la Chine.
Certes, il reste des cas irrésolus dans l’industrie. Par exemple Airbus
est la métaphore industrielle de l’Union Européenne, comment seront
traiter les actifs britanniques de l’avionneur ? Sans leurs ailes ou
leurs moteurs made in UK comment les avions voleront-ils ? Les solutions
existent !
Dans un futur proche, l’Angleterre ressemblera aux impulsifs qui détruisent les chenilles tout en raffolant des papillons. Elle sera seconde face aux six pays fondateurs de l’Union Européenne, son influence à Washington chutera. Pékin est déjà perplexe c’est-à-dire qu’elle est aux limites naturelles de sa compréhension des choses. Moscou n’est pas désolée de la dispersion du Royaume-Uni façon puzzle : vive l’Ecosse. Cette dernière sera européenne à part entière, dès l’Espagne dira oui, c’est à dire que Gibraltar, voulant rester dans l’Union Européenne, reviendra en Espagne … ou deviendra écossaise !
Symétriquement l’Union Européenne à son avenir. Regardant ce chaos anglais désolant, on se dit qu’au nom de l’intérêt supérieur de la nation, parfois celle-ci doit refréner de donner son avis. Avec les 450 millions d’Européens, que la France y reste.
Publié dans Les Échos le 03 07 2016