La guerre de l’eau en Afrique du Sud

In Les Échos le 08 02 2018

Paris regorge d’eau cet hiver, mais en Afrique du Sud, au Cap, la guerre de l’eau a commencé.

Il ne pleut pas au Cap depuis 3 ans, les réservoirs sont très bas. Chaque habitant consommait en moyenne 300 litres d’eau par jour en 2000, 200 litres d’eau en 2014, depuis 2017 il lui était recommandé de ne consommer que  87 litres d’eau par jour, mais face à l’échec de cette mesure il est rationné à 50 litres par jour depuis le 1 février 2018.

Ce chiffre moyen est calculé pour 10 litres d’eau pour la douche, dix pour la cuisine et la vaisselle, dix pour le linge, neuf pour les toilettes, cinq pour le ménage, trois pour boire, deux pour les dents et les mains, un pour l’animal de compagnie.

Dès que le niveau d’eau dans les réservoirs aux alentours de la ville atteindra le chiffre de 13,5 %, il est actuellement à 15 %,  le rationnement passera à 25 litres par jour et par habitant, c’est un niveau de survie répertorié par l’OMS.  

S’il ne pleut pas d’ici là,  le jour à 25 litres est programmé au 11 mai 2018. C’est-à-dire que ce jour-là  les canalisations d’eau seront toutes fermées sauf pour les consommations d’urgences.

Dès lors, la ville approvisionnera chaque jour ses 4 millions d’habitants de 25 litres d’eau via environ 200 points de livraison ; chacun prévu pour 20 000 habitants. En d’autres termes, chacun passera une grande partie de sa journée à attendre sa livraison d’eau et à transporter ses 25 kg d’eau à son domicile.

S’il ne pleut pas d’ici le mois de mai, l’impact du manque d’eau frappera partout : économie, agriculture, tourisme, environnement. L’impact de cette course à l’eau n’est pas mesurable sinon par un monumental chaos.

En outre, le coût sociétal risque d’être immense entre ceux qui auront probablement accès à plus d’eau parce qu’ils en auront les moyens et les autres.

Quelle résilience ?

D’abord faire un diagnostic.

• En 15 ans, la population du Cap croissait de 25 % alors que le nombre de foyers augmentait lui de 60 %. Plus de famille, mais chacune moins nombreuse, et la consommation d’eau augmente exponentiellement.

• Simultanément, les constructions d’infrastructures dédiées à augmenter les réserves structurelles d’eau ont été déconnectées de l’accroissement de la population.

• Enfin, la sécheresse depuis 3 ans n’a fait qu’augmenter les conséquences de ces deux déséquilibres.

Comment adapter la ville ?

Premièrement, configurer la ville du Cap pour une résilience dans la pire des situations : il ne pleuvra pas d’ici le mois de mai et 20 000 personnes attendront 25 litres d’eau chaque jour à chacun des 200 points de distribution.

Deuxièmement, utiliser les « obligations vertes » pour innover notamment dans les énergies bon marché destiner à alimenter en électricité des usines de déstalinisation d’eau, rénover les réseaux de distribution d’eau, recycler l’eau, construire de plus grands réservoirs d’eau douce. C’est la voie suivie dans des situations analogues en Australie à Perth et Adélaïde.

Ultimo, dans le cadre du changement climatique, faudra-t-il tout simplement interdire aux villes sans eau d’augmenter leur population ?