Des esprits annoncèrent la fin du monde le 21 décembre 2012. Confondaient-ils la fin du monde avec la fin d’un monde ?
Fin d’un monde, celle qui s’annonce chaque année dès le début de l’hiver ? Fin d’un monde économique qui se répète à chaque cycle de Kondratiev ? Fin d’un monde politique à la façon de Saint Augustin ? Anticipation de la fin de notre monde cosmique dans quelques 4 à 5 milliards d’années ?
Quoi qu’il en soit, chaque fin d’un monde est suivie d’une renaissance, et l’acier n’échappe pas à la règle.
En mai dernier, ce blog indiquait que les acheteurs d’acier veilleraient à retarder leurs achats jusqu’à la fin de l’été. Comme l’indique le graphique 1, le prix de l’acier chez le premier producteur d’acier du monde, la Chine, touchait la fin d’un monde en septembre 2012. Depuis, l’automne puis l’hiver témoignent d’une renaissance.
La Chine produit 50% de l’acier mondial, avec le reste de l’Asie ce sont 65 à 70 % ; les sidérurgistes des Etats-Unis bénéficient de baisses des coûts associés au gaz de schiste. A l’avenir, combien l’Europe produira-t-elle d’acier ?Combien les consommateurs importants seront- ils en Europe ?
C’est en prévision de prises d’options pour 2013 que je répondais à une poignée d’entre eux et voici ces éléments logistiques :
• D’abord le calendrier. Conjoncturellement, encore plus que d’habitude, il faut être au clair sur ses options avant la nouvelle année chinoise.
• Après un plus bas aux environs de 85 $ la tonne, le prix du minerai de fer s’appréciaient en fin d’année jusqu’à 140 $ la tonne et il continu cette ascension pour surpasser le coût marginal des producteurs les moins profitables. Cependant la Backwardation indiquée sur le graphique 2 laisse présager un retour vers des niveaux moins élevés dans quelques semaines. Production et consommation de minerai de fer sont parfaitement barrées bord à bord comme l’indique les décisions de Fortescue en décembre. Malgré les effets de stockage ces indications sont et restent un indice.
• Les prix du charbon coke ne sont plus un baromètre du monde de l’acier depuis qu’ils n’obéissent plus aux seules injonctions des aciéries mais qu’ils évoluent sous l’influence de la renaissance américaine des hydrocarbures de schiste.
• L’acier russe conserve la stabilité et les atouts de sa production intégrée. La reprise de mines de fer d’ArcelorMittal au Canada par Posco cède à la même logique.
• Structurellement, aux Etats-Unis, maintenant que chacun à compris l’importance des hydrocarbures de schiste sur l’emploi, l’économie, la croissance il faut en détailler l’impact sur l’industrie au sens large et donc sur l’organisation de l’acier nord américain.
Ce dernier a tous les attributs d’une renaissance. Si nous avions un François 1er, son De Vinci lui enseignerait sans doute que le prix du gaz de schiste permettra d’y réduire d’environ un quart le coût de production d’acier par rapport à la filière classique. C’est aussi pourquoi d’aucuns se concertent sur l’acquisition d’une usine Thyssen dans l’Alabama. Le cercle vertueux de la renaissance de l’acier sera, en outre, nourri par la construction de milliers de kilomètres de gazoducs supplémentaires.
• Dès que l’Asie embrassera cette même ressource gazière en remplacement du charbon, le coût de production moyen pourrait s’abaisser encore d’un cran au désespoir de ce qui restera de la sidérurgie européenne. Cette étape sera précédée d’une probable rationalisation des surcapacités chinoises dès que les alliances politiques internes au pays le permettront.
Publié dans Les Échos le 09 01 2013