L’ancienne bulle finit à peine d’imploser que la nouvelle se forme. Elle grossira là où les nouvelles régulations n’iront pas mettre leur nez et sera la conséquence de la perte de puissance du dollar qui, quoiqu’on dise, voit sa première place voler en éclat.
Où iront les moutons ? Sur les matières premières.
En 1979, les frères Hunt avaient étranglé
l’argent métal (50% des réserves mondiales de l’époque), mais le Comex
et la Fed, émus par le « squeeze », étaient intervenus.
Rappelez-vous du dernier coup d’éclat de Warren Buffet. En 1997,
discrètement, en dehors des marchés, il avait accumulé environ 20% de la
production annuelle d’argent métal mais sous la pression il révélait sa
position longue. Déjà, il craignait l’exubérance et l’inflation. A
cette époque, comme aujourd’hui, personne ne pouvait l’en empêcher.
Marché global mais règlementations locales.
Aujourd’hui c’est encore l’argent métal qui est accumulé dans les ETF mais aussi l’or, le platine, le palladium, les métaux de base, le pétrole et toute l’agriculture. Sans compter les ETF sur indices… de matières premières.
Danger ?
Oui, bien sûr, aux Etats-Unis, l’an dernier, Joe Libermann souhaitait
barrer cet accès aux investisseurs. Selon l’agence Reuters, le 14
octobre, devant l’Assemblée Nationale, Christine Lagarde s’interrogeant
sur les prix des matières premières et la spéculation qui y est liée
s’inquiétait du manque d’outil régulateur.
Danger encore, lorsque le dollar a la peste et que les fuyards se concentrent dans de petits marchés, parfois de petits pays, qui deviennent rapidement très fortement inflationnistes et contre-productifs vis-à-vis de la croissance. Espérons toutefois que cette même fuite du dollar assouplira la convertibilité du renminbi et le transformera en troisième monnaie de réserve avec l’euro.
Danger, lorsque les prix des matières premières agricoles s’emballent et provoquent des troubles dans les pays qui ne sont pas autosuffisants. Un cierge pour l’agriculture française ! D’ailleurs, si un jour un petit ETF laitier se construit, quel serait l’impact sur les prix ? Les investisseurs aideront-ils les agriculteurs ?
Danger, car toute les matières premières énergétiques et minérales sont porteuses d’une auto-inflation qui se propage au reste de l’économie. Auto-inflation car la hausse des prix des « commodities » s’accompagne d’une hausse de leurs coûts de production et, par effet cliquet, les prix ne redescendent plus. (Voir « Cuivre, pourquoi on est actuellement au juste prix » : « Alors que toutes les forces se sont conjuguées pour peser sur les cours du cuivre, les prix les plus bas de 2008 sont restés plus de deux fois plus élevés que le prix moyen du cuivre 5 ans plus tôt. »).
Danger, enfin, pour l’investisseur englué qui sortira toujours en retard lorsque les transactions ne seront plus fluides. Pour les Hunt, l’argent a perdu 50% en une journée. Regardez la courbe des prix du palladium de janvier à février 2001, lorsque le Tokyo Commodities Exchange est intervenu. Imaginez lorsqu’il vous faudra sortir du sucre, du cacao, du soja, du coton, du riz.
Franchement, il y a mieux à faire pour le long terme.
Publié dans Les Échos le 21 10 2009