Les marchés calmes se ressemblent tous ; les marchés agités sont agités chacun à sa façon.
Les prix des matières premières montrent une amélioration tous azimuts. Les fondamentaux s’améliorent : demandes en hausses, réductions -même faibles- des stocks et productions disciplinées. En outre, le pilotage de l’économie chinoise par le premier ministre se concrétise par une demande chinoise de matières premières aussi bien dans l’industrie de transformation, la construction et la consommation. Au total la chaine de la valeur affiche un sentiment positif qui tranche avec celui de 2015.
S’il est encore tôt pour affirmer un optimisme sans limite, la seule
chose qui soit sortie de Doha est une incertitude supplémentaire à
propos de la fin du conflit opposant les forces pétrolières de l’ancien
régime (sans le schiste ni l’Iran) et celles de la nouvelle normalité
(avec le schiste et l’Iran) ; cette incertitude éloigne la stabilité du
pétrole ; cette instabilité initie une la prise de risque et par
conséquent les investissements spéculatifs en direction des matières
premières. Si leurs marchés agités sont agités chacun à sa façon
(calmes, ils se ressemblent tous), depuis environ 6 mois les prix des
ressources naturelles se corrèlent dans un rattrapage des prix : acier
+80%, minerai de fer + 80%, zinc -la possible étoile de 2016- +32%,
palladium +30%, argent métal +30%, platine +27%, or +22%, et en
moyenne + 15% pour le cuivre, le nickel, l’aluminium, le plomb et le
pétrole. Pour certains, le nadir des prix de 2015 n’est plus qu’un
lointain souvenir.
Toutefois, quelques fondamentaux de marchés, par exemple sur certains
métaux, ne justifient pas encore des hausses de prix uniformes.
L’inégalité règne notamment sur la stabilité des coûts de production à
cause d’une offre excessive (nickel) ou au contraire d’un déficit encore
caché (zinc) ; inégalité également à propos des part d’ombre sur les
stocks de métaux disponibles (nickel et aluminium) ; inégalité enfin sur
les perspectives de consommation industrielle (cuivre et plomb).
Ces progressions de prix sont parfois une « avance sur trésorerie », une nouvelle normalité anticipée. Anticipation de prix qui sait qu’un pétrole plus cher augmente les coûts d’extraction des minerais ; anticipation qui, plus que par le passé, verra les signaux de prix naitre en Asie avec ses fonds d’investissement « chaotiques », et moins sur les marchés occidentaux « rangés » tel que le LME ; anticipation qui s’enorgueillit de taux d’intérêt qui se sont transformés en taux de désintérêt… parce que négatif ; anticipation toutefois construites sur de réelles visions qui se nomment modernisation, industrialisation, habitat, électrification, consommation de l’Inde, de l’Asie du Sud-Est, de l’Afrique et le tout liées entre elles par les diverses routes de la soie chinoises.
Publié dans Les Échos le 21 04 2016