C’est vrai, lorsque je vous écrivais « Échange dette nationale contre archipel » en décembre 2009, je ne pensais pas qu’à la Grèce. Certes il y avait un peu de cela, mais l’acheteur et la valorisation de l’actif m’intéressaient aussi. Cette fantaisie aura été utilisée, en février, outre-Rhin, dans une argumentation irritante pour une administration à l’époque hésitante. Au lieu d’un archipel c’est l’or qui est acheté, est-ce le signal d’une renonciation, de l’impuissance, de l’affolement ou d’une belle opportunité ?
Affolement. Toutes ces
barres, pièces et ETF d’or achetés dans la plus grande pagaille ouvrent,
à mon avis, les portes de liquidations douloureuses. L’auto-entretien
du marché haussier qui guide les marchés de nos jours aura une fin.
Renonciation car malgré toutes les embuches, crises, erreurs de trading
et dettes accumulées, l’or n’est toujours pas à 1500 $ ou au dessus.
Etape qui commencerait à crever l’abcès.
Impuissance européenne car nous ne retenons rien : il y a douze mois j’écrivais dans la Tribune « …
Comme aujourd’hui rares sont ceux qui ont retrouvé une confiance dans
notre système financier, investir dans l’or s’avère particulièrement
pertinent. En effet, l’on oublie souvent que l’or n’est pas une valeur
refuge ni une relique barbare mais possède pour principale propriété de n’être la dette de personne. Si vous avez investi dans le métal jaune, vous n’aurez à courir après personne pour l’échanger contre une autre valeur… ». Cela est et sera toujours d’actualité lorsque la dette guide les marchés.
Les deux bonnes nouvelles
dans cette cacophonie ne sont elles pas l’espoir que nous ne verrons pas
les 1500$ – 2000$ immédiatement. Franchement tout convergeait,
faudrait-il attendre la vraie faillite d’une grande puissance pour y
arriver ? Mais les Etats-Unis, les BRIC et l’Asie en général vont mieux,
voire n’ont jamais été en difficulté industrielle ?
Par ailleurs, l’or est au sommet pour les heureux investisseurs qui ont
fait ce pari. Aujourd’hui au zénith d’une crise, période synchro, l’on
peut vendre un or exprimés $ comme en € à des sommets historiques (l’
€/$ est proche de son cours moyen LT de 1.2).
La crise grecque est une opportunité conjoncturelle pour les stratèges industriels ressources naturelles en mal d’idées positives. En effet, en sévère contraste avec l’or les prix des autres métaux précieux, le platine et le palladium, qui sont tout autant accessibles à l’investisseur, chutent. Les platinoïdes comme les autres ressources naturelles connaissent une consommation industrielle forte, opposée à celle de 2008 mais leurs facettes industrielles sont visées par cette nouvelle convulsion financière. En conséquence, CO² mis à part, les prix baissent (Pt1650, Pd 500, Cu 6900, AL 2050, WTI 75…). L’amplitude de cette baisse est moindre qu’il y a deux ans, les cours planchers sont proches et elle doit être considérée comme une occasion d’achat car le swap commodities-$, reflet d’une dévaluation de l’euro que l’on jugera dans quelques années, espérons le, positive sera peut-être de courte durée. Du moins tant que le taux du renminbi restera semi-rigide.
Nous oublions trop souvent en Europe
que le reste du monde va mieux que la Grèce. Et, sans rentrer dans un
nouveau débat sur le découplage nous atteignons dans la douleur la
troisième étape du dialogue entre pays développés et émergents :
1) Je ne sais pas comment vous le faites mais je constate que cela marche mieux chez vous que chez nous.
2) Chez vous, cela marche bien, je commence à comprendre votre
fonctionnement mais votre pyramide des âges évolue déjà vers un cône
inversé comme chez nous.
3) Au fond, dette à part vous n’êtes pas si différents de nous.
La crise financière qui à été perméable à toute la planète se distingue de la crise industrielle qui ne serait qu’européenne. L’or serait-il l’affaire des pays développés et les autres matières celle de pays émergents ? En bref, un autre découplage !
Publié dans Les Échos le 09 05 2010