Les pro-pétrole et les anti-voiture électrique

Le récent documentaire « À Contresens : Voiture électrique, la grande intoxication », révèle que les Frères Koch, milliardaires texans du pétrole, activistes et soutien financiers de Donald Trump, ont investi 10 millions de dollars dans des documentaires médiatisant que le bilan CO² des véhicules électriques est plus mauvais que celui des modèles thermiques grâce à des arguments tels que : les « métaux rares » et les terres rares utilisés dans les batteries, et subséquemment l’épuisement proche de ces ressources minières, la dépendance de la voiture électrique à l’égard du travail d’enfants dans les mines de cobalt en République Démocratique du Congo, le lithium d’Amérique du Sud, etc…  Autant de raisonnements qui font sourciller les experts des métaux et de la géopolitique des ressources naturelles.

Le fait est que depuis deux ans ces mêmes éléments créés par le clan pro-pétrole sont propagés par celui des anti-voiture électrique dans une forte offensive médiatique : mêmes arguments sur les « métaux rares » et « terres rares », mêmes études pseudo-scientifiques, mêmes livres ou mêmes reportages. La récente analyse du magazine EnerGeek en témoigne.

Adoptée par le milieu politique, la thèse anti-voiture électrique est reprise en boucle par les médias grand public, les chaînes d’information, les radios qui privilégient le sensationnalisme, l’émotion délétère, la caricature de l’anti-voiture électrique sans examiner, sans étudier le contradictoire, sans regarder les faits, sans s’interroger. L’ensemble aboutit depuis peu à une alternative aux moteurs thermiques et électriques, la voiture à hydrogène, sans dire que le gaz naturel en serait le principal gagnant.

De fait , le cumul des avantages de la voiture électrique propulsée par une électricité produite par exemple par l’économie circulaire du nucléaire avait toute les chances de se heurter aux intérêts des pro-pétrole, couplés à ceux des anti-nucléaire. Assez logiquement, la résultante de ces deux courants s’est cristallisée sous la forme du mouvement des anti-voiture électrique armé de la fake news des “métaux rares”. Construite pour discréditer en Europe les usines et le progrès technique de la mobilité électrique, sans jamais proposer d’alternative sinon tout stopper, ce canular “métaux rares” fait fuir les entreprises, fait passer l’industriel pour un voyou et la science une malédiction.

Déconstruire la fake-news anti -électrique

Outre la révélation de cette offensive médiatique commune aux pro-pétrole et aux anti-voiture électrique, notre intérêt est la déconstruction de cette fake-news anti électrique par les faits : sur le cobalt et le travail des enfants en RDC, sur le basculement du pétrole vers les métaux, sur le lithium, sur le recyclage des batteries, sur l’inexistante « guerre de métaux » confondue avec le « Grand Jeu des métaux », sur les « métaux rares » qui n’existent pas – il faut plutôt et plus intelligemment parle de métaux stratégiques ou critiques suivant les options suivant les options étatiques ou industrielles- et sur les « terres rares » qui ne sont pas rares, et contrairement à ce qui est martelé, elles sont peu présentes voire absentes des véhicules électriques ce qui est loin d’être le cas pour les voitures essence et diesel. Bref, réfuter la fake-news “métaux rares” anti-voiture électrique  qui se prolongera sans doute par la suite sur l’hydrogène. Cette dernière solution à tous les attraits d’un miracle politique grâce aux énergies vertes, mais tous les défauts d’une erreur environnementale puisqu’elle fonctionnera dans la réalité grâce au gaz naturel, sans parler de son efficacité technique lorsque l’on observe avec attention son rendement énergétique

C’est pourquoi, cette alliance entre pros pétrole et anti électrique des “métaux rares” perd la bataille contre les partisans de la mobilité électrique : le véhicule électrique est moins polluant que le moteur thermique. Si les véhicules électriques ne contiennent pas de terres rares, que d’autre part ni le lithium, ni le nickel, ni le cobalt des batteries ne sont rares et qu’enfin les progrès techniques remplacent déjà ces métaux par d’autres matières abondantes comme le fer ou le manganèse, il reste peu de chose aux pros-pétrole pour tuer la voiture électrique. En effet, quelle que soit l’origine de l’électricité, grâce à son rendement énergétique le moteur est électrique pollue moins que le moteur thermique.

L’autre réalité est que le succès des voitures avec batteries s’impose dans le monde. En Europe, la part de marché de l’électrique a doublé en 2019, puis a une nouvelle fois été multipliée par deux en 2020. Par pays, elle était en fin d’année de 50 % en Norvège, 20 % en Allemagne, 16 % en Angleterre, 15 % en France. Avec près de 1,4 million de voitures électriques vendues en 2020, soit 8 % des ventes, le marché européen est leader mondial, et il doublera pour atteindre 15 % en 2021. En deuxième position, les 400 constructeurs automobiles chinois écoulaient sur leur marché national environ 1,3 million de véhicules électriques. Les États-Unis sont loin derrière avec 350.000 unités vendues, et le Japon culmine lui à 40.000 ventes. Au total, les ventes mondiales avoisinent les 3 millions de véhicules, soit 4 % du marché mondial, mais elles sont attendues à 30 % en 2025 puis 70 % avant 2040 dès que les États-Unis de les États-Unis de Joe Biden accéléreront grâce au “green deal” démocrate: abandon de la rhétorique pro-pétrole de son prédécesseur, retour aux accords de Paris de la COP 21, mise en place des mesures incitatives et fixer une date telle que 2050, au-delà de laquelle la vente de moteur thermique sera interdite.

Cette intoxication menée par les pros-pétrole, avec l’aide des anti électrique des “métaux rares” , fait sourire les experts du secteur des métaux. Elle restera dans notre pays de son début jusqu’à sa fin prochaine, une intéressante étude de cas complotisme qui servira l’enseignement de la manipulation de l’information et de l’intégrité des médias dans les écoles de journalisme et d’infoguerre.